Certes, l’horreur est un genre à part entière et ses aficionados ne rechignent jamais à en profiter tout au long de l’année. Pour les plus frileux – ou néophytes, on ne juge point – préférant toutefois se réserver le grand frisson au 31 octobre, voici une liste de 15 films à (re)découvrir pour changer des franchises Scream, Saw et autres Conjuring à Halloween !
Promis, on ne dira rien si vous les regardez la lumière allumée.
Cure (Kiyoshi Kurosawa, 1997)
Un officier de police, Takabe, enquête sur une série de meurtres dont les victimes sont retrouvées avec une croix gravée dans le cou. Un jour, un jeune vagabond est arrêté près de l’endroit ou a été retrouvé le dernier corps. Il est vite identifié comme un ancien étudiant en psychologie, devenu fou et ayant d’inquiétants pouvoirs hypnotiques, lui permettant de pousser des gens à commettre des actes criminels…
Saint patron de l’angoisse japonaise et amoureux des fantômes – quelques qu’ils soient – Kiyoshi Kurosawa est parvenu à la reconnaissance internationale grâce à ce thriller psychologique dont les codes pervertit allègrement ceux de ses consorts nord-américains. Là, le morbide et le pervers ne se donne pas la main par amour du trash saturé d’hémoglobine et de sensationnalisme, non. En réalité, il est plutôt question de flirter avec l’horreur sans y plonger complètement, tant et si bien que Cure oscille en permanence sur un fil résolument sinistre.
Possession (Andrzej Żuławski, 1981)
Rentrant d’un long voyage, Marc retrouve à Berlin sa femme Anna et son fils, Bob. Mais rapidement, il se rend compte que le comportement de sa femme a changé. Prise de violentes crises, elle quitte le domicile. L’amie du couple, Annie, révèle à Marc le nom de l’amant d’Anna, Heinrich. Lorsqu’elle disparaît, Marc engage un détective qui découvre bientôt qu’Anna s’est réfugiée dans une étrange demeure où semble se cacher une créature surgie des ténèbres…
Classique parmi les classiques, Possession peut non seulement se vanter de ne (presque) pas avoir pris une ride, mais il signe également l’une des performances les plus marquantes de son actrice de tête, Isabelle Adjani. Habitée par son rôle, celle-ci remportera le prix d’interprétation féminine du Festival de Cannes, ainsi que son tout premier César en 1982. Pour ce qui est du film, point de distinction notable, si ce n’est qu’il est proprement glaçant.
Morse (Tomas Alfredson, 2008)
Oskar est un adolescent fragile et marginal, totalement livré à lui-même et martyrisé par les garçons de sa classe. Pour tromper son ennui, il se réfugie au fond de la cour enneigée de son immeuble, et imagine des scènes de vengeance. Quand Eli s’installe avec son père sur le même pallier que lui, Oskar trouve enfin quelqu’un avec qui se lier d’amitié... et son arrivée dans cette banlieue de Stockolm coïncide avec une série de morts sanglantes et de disparitions mystérieuses.
Nous sommes en 2008, et les amours adolescentes figurant l’humain et le vampire lasse le grand public. La faute à un premier Twilight qu’il serait dommage de renier, mais aussi, d’une longue, très longue série films pseudos fantastiques et mal inspirés. Et puis le miracle ; un long-métrage à la genèse gentiment improbable, porté par un duo de jeunes acteurs sublimes dans leurs rôles respectifs. Loin d’être un long-métrage usant d’artifices pensés dans le but d’horrifier son public, Morse joue davantage sur le non-dit, le latent et le hors-champ – la poésie dans le sang.
Hérédité (Ari Aster, 2018)
Lorsque Ellen, matriarche de la famille Graham, décède, sa famille découvre des secrets de plus en plus terrifiants sur sa lignée. Une hérédité sinistre à laquelle il semble impossible d’échapper.
Ari Aster est incontestablement un homme d’influence, et son premier long-métrage n’a guère à rougir de ses inspirations. Son récit englué dans les retors de thématiques pourtant longuement éculées par le genre (le deuil, le dysfonctionnement familial, les traumatismes intergénérationnels), Hérédité suffoque son spectateur avec une précision chirurgicale – en lui laissant assez d’oxygène pour demeurer conscient, mais suffisamment peu pour entretenir une angoisse croissante. Promesse monstrueuse, le film livre son Mal sur un plateau d’argent ; et bien-sûr, ce n’est pas celui auquel le spectateur s’attend.
Les Prédateurs (Tony Scott, 1983)
Miriam est une femme-vampire née en Egypte il y a 4000 ans. Elle possède le don de l’immortalité et de la jeunesse. Elle vit,désormais, à New York, avec son compagnon
John depuis 300 ans. John est alors frappé d’un processus accéléré de vieillissement. Afin de tenter de le sauver, Miriam rencontre la séduisante Sarah, docteur spécialiste des
mécanismes du vieillissement, sur laquelle elle jette son dévolu…
David Bowie, Catherine Deneuve, Susan Sarandon… a-t-on réellement besoin d’en écrire davantage sur le sujet pour convaincre ? Au cas où ces trois arguments pourtant lourdement persuasifs ne suffiraient pas, la qualité plastique du premier long-métrage de Tony Scott devrait achever de séduire les plus réticents. Encapsulant le meilleur des années 80 quelque cent minutes durant, Les Prédateurs propose une oeuvre vampirique aussi atypique que sensuelle. Après tout, l’effroi n’a pas le monopole du frisson.
The Crow (Alex Proyas, 1994)
La veille de leur mariage, Eric Draven et Shelly Webster sont sauvagement assassinés. Un an plus tard, un corbeau ramène Eric à la vie au cœur d’une ville plongée dans les ténèbres. Eric va se laisser conduire là où sa vengeance l’appelle. Pour que justice soit faite. Pour l’amour de Shelly.
Endeuillé, le tournage seul du film d’Alex Proyas suffirait à susciter le trouble, mais cela reviendrait à réduire l’objet à sa tragédie. Marqué par le décès tragique d’un Brandon Lee en pleine ascension, The Crow transpire l’affliction de la perte par sa genèse comme par son récit. Mais que l’on ne s’y méprenne pas ; conte gothique à l’esthétique impeccable, le film est avant tout l’histoire d’une impitoyable quête punitive. Les corps pleuvent. Mais « l’éclaircie vient après la pluie« .
Deux Soeurs (Kim Jee-Woon, 2003)
La jeune Su-Mi, récemment libérée d’un établissement psychiatrique retourne chez elle avec sa petite sœur, mais elle doit faire face à des événements troublants entre son insupportable belle-mère et les fantômes qui hantent leur maison, tous liés à un sombre passé dans l’histoire de la famille…
Deux Soeurs est un film dont les fonctions s’évaluent à de multiples échelles. Thriller psychologique, horreur sous-jacente et twist nerveux s’entremêlent ainsi jusqu’à rendre compte d’un récit fébrile, quasi fiévreux. C’est que les fantômes guettent, qu’ils ne sont jamais bien loin. Et que l’on est jamais mieux trahit que par les siens.
La Dame en noir (James Watkins, 2012)
Arthur Kipps, jeune notaire à Londres, est obligé de se rendre dans le petit village perdu de Crythin Gifford pour régler la succession d’une cliente récemment décédée. Dans l’impressionnant manoir de la défunte, il ne va pas tarder à découvrir d’étranges signes qui semblent renvoyer à de très sombres secrets.
N’y allons pas par quatre chemins ; s’agit-il de la proposition la plus pertinente de cette liste ? Nullement. S’agit-il au demeurant d’un film qui mérite malgré tout que l’on s’y intéresse ? Modérément. Premier long-métrage post Harry Potter de sa tête d’affiche Daniel Radcliffe, La Dame en noir n’est pas exactement ce que l’on pourrait appeler un bon film, mais ses prémisses sont honnêtes, et constituent une porte d’entrée idéale aux spectateurs peu désireux de dormir la lumière allumée toute la semaine. Après tout, le prix au kilowattheure a bien de quoi déclencher un infarctus ou deux.
The Jane Doe Identity (Ian B. Goldberg, 2016)
Quand la police leur amène le corps immaculé d’une Jane Doe, Tommy Tilden et son fils, médecins-légistes, pensent que l’autopsie ne sera qu’une simple formalité. Au fur et à mesure de la nuit, ils ne cessent de découvrir des choses étranges et inquiétantes à l’intérieur du corps de la défunte.
À première vue, The Jane Doe Identity ne paie pas de mine, mais après tout, l’adage n’a pas été créé pour rien, et il faut bel et bien se méfier de l’eau qui dort – ou dans le cas présent, de ce corps immobile au regard vitreux. Interprété par l’actrice Olwen Kelly plutôt qu’un banal mannequin, le cadavre suscite graduellement le malaise jusqu’à l’épouvante la plus primaire. Huis clos étouffant, le film brille avant tout par son atmosphère intense, hostile. Quelque chose grouille sous la peau d’albâtre.
Catacombes (John Erick Dowdle, 2014)
Deux explorateurs partent à la recherche d’un trésor dans les catacombes de Paris.
Que serait une liste de films d’horreur sans le traditionnel projet de found footage ? Si les origines du genre sont initialement relatives à un savant mélange d’art expérimental, d’impératifs financiers, ainsi que d’une bonne dose de culot, c’est bien entendu par l’audacieux Projet Blair Witch de 1999 qu’il sera popularisé auprès du grand public. Devenu entre-temps l’apanage de l’épouvante et autres projets similaires tels que les franchises [REC] et Paranormal Activity, le found footage a bien servit John Erick Dowdle pour son Catacombes, plongée claustrophobe dans les affres d’une ville sous la ville. Oh, et il y a François Civil au générique.
Stoker (Park Chan-Wook, 2013)
Après la mort de son père dans un étrange accident de voiture, India, une adolescente, voit un oncle dont elle ignorait l’existence, venir s’installer avec elle et sa mère. Rapidement, la jeune fille se met à soupçonner l’homme d’avoir d’autres motivations que celle de les aider. La méfiance s’installe, mais l’attirance aussi…
Certes, on ne tarira jamais assez d’éloges sur le maître de l’angoisse coréenne ; il s’agit toutefois de prendre quelques instants pour dévier de ses classiques et reconsidérer son tout premier essai hollywoodien. Porté par une Mia Wasikowska révélée depuis peu au grand public par la revisite d’Alice au Pays des Merveilles par Tim Burton, le film recycle chacun des réflexes narratifs du cinéaste. Érotisme et manipulation se jouent d’une danse macabre sur fond de cinégénie à la maîtrise virtuose, et le tout n’en est que plus oppressant.
A Cure for Life (Gore Verbinski, 2017)
Jeune cadre ambitieux, Lockhart est lancé sur la trace de son patron Roland Pembroke, disparu dans un mystérieux centre de bien-être situé en Suisse. Sur place, il tente de communiquer avec lui, mais s’en retrouve vite empêché par le personnel et le docteur Heinrich Volmer.
Porté par une photographie somptueuse, une atmosphère glaçante, et une mise en scène sophistiquée, A Cure for Life est un métrage fascinant dans son ensemble, à condition de ne pas s’attacher de trop près à son récit. En effet, le plaisir que procure le dernier film en date de Gore Verbinski est formel avant d’être narratif. Belle proposition de cinéma de genre malgré tout, le film profite également des belles performances de Dane Dehaan, Jason Isaacs et Mia Goth, et un tel trio ne se refuse pas.
Dark Water (Hideo Nakata, 2002)
En instance de divorce, Yoshimi et sa fille de six ans Ikuko emménagent dans un immeuble vétuste de la banlieue de Tokyo. Alors qu’elles tentent de s’acclimater à leur nouvelle vie des phénomènes mystérieux se produisent. Une menace venue de l’au-delà va tenter de séparer la mère de sa fille.
Parlons peu, parlons bien : ce film glace le sang comme il brise le coeur.
His House (Remi Weekes, 2020)
Après avoir fui les horreurs de la guerre au Soudan du Sud, un jeune couple de réfugiés peine à s’adapter à la vie dans une ville anglaise rongée par un mal profond.
D’aucuns seraient en droit de se demander pourquoi diable s’escrimer à dresser une liste de films suscitant l’horreur alors que le JT de 20h suffit amplement à remplir ce pré-requis. C’était sans compter sur l’habileté de Remi Weekes à conjuguer le cauchemar de la crise des réfugiés au ressort bien connu de la maison hantée. Ici, les murs n’ont rien à envier aux personnages, tiraillés entre les différents démons qui les tourmentent. Inutile sans doute, de préciser que les plus pernicieux vivent en dedans.
Saint Maud (Rose Glass, 2021)
Maud, infirmière à domicile, s’installe chez Amanda, une célèbre danseuse fragilisée par la maladie qui la maintient cloîtrée dans son immense maison. Amanda est d’abord intriguée par cette étrange jeune femme très croyante, qui la distrait. Maud, elle, est fascinée par sa patiente. Mais les apparences sont trompeuses.
Présenté au festival de Toronto et privée de sorties sur grand écran en France – la faute à une pandémie que l’on ne présente plus –, Saint Maud tisse l’effroi pour mieux produire une toile inattendue. Plutôt que de recycler à ne plus savoir qu’en faire une imagerie bien trop éculée par le genre, Rose Glass préfère figurer la foi de son personnage de tête comme une relation perfide, sinueuse, maniaque. Récit, mise en scène et performances sont alors usés pour mieux confondre et bouleverser son spectateur. Les enjeux sont tangibles, nets. La morale, peut-être moins.